RG N ° 10/03949 JLB
N° Minute 87
EXTRAIT DES MINUTES
DU SECRÉTARIAT-GREFFE
DE LA COUR D'APPEL DE GRENOBLE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE COMMERCIALE
ARRET DU JEUDI 02 FEVRIER 2012
Appel d'une décision (N° RG 2010F827)
rendue par le Tribunal de Commerce de GRENOBLE en date du 06 septembre 2010 suivant déclaration d'appel du 14 Septembre 2010
APPELANT :
Monsieur Louis DEGACHE
né le 04 Avril 1938 à GRENOBLE (38100) 35 avenue du Granier 38240 MEYLAN
représenté par Me Marie-france RAMILLON, en qualité d'avoué jusqu'au 31 décembre 2011 et d'avocat au barreau de GRENOBLE postulant à compter du 1 er janvier 2012 assisté de Me Hassan KAIS, avocat au barreau de GRENOBLE
INTIME
Maître Christian GUYOT ès-qualités de liquidateur de la société SAECL
16 rue Général Mangin
38100 GRENOBLE
représenté par la SCP POUGNAND Herve-Jean, en qualité d'avoué jusqu'au 31 décembre 2011 et d'avocat au barreau de GRENOBLE postulant à compter du 1 er janvier 2012 assisté de Me Philippe LAURENT, avocat au barreau de GRENOBLE
COMPOSITION DE LA COUR
LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :
Monsieur Jean-Louis BERNAUD, Conseiller, faisant fonction de Président,
Mme Fabienne PAGES, Conseiller,
Mme Annick ISOLA, Vice-président placé,
Assistés lors des débats de Mme Nadine LEICKNER. Greffier.
Copie exécutoire délivrée le : 02 02 12
S.C.P. CALAS
S.C.P. GRIMAUD
Me RAMILLON
S.C.P. POUGNAND
S.E.LA-R.L. DAUPHIN & MIHAJL0VIC
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Auquel l'affaire a été régulièrement communiquée.
DEBATS
A l'audience publique du 07 Décembre 2011, Monsieur Jean-Louis BERNAUD, Conseiller, a été entendu en son rapport,
Les avocats ont été entendus en leurs conclusions et plaidoiries,
Puis l'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu ce jour,
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La SARL SAECL, qui exerçait une activité de conseil en gestion auprès des entreprises et des collectivités locales a été placée en liquidation judiciaire sur l'assignation d'un créancier par jugement du tribunal de commerce de Grenoble en date du 2 juillet 2004.
Par jugement du 4 septembre 2006, confirmé par arrêt de cette cour du 26 juin 2008, M. Louis DEGACHE, son gérant, a été condamné à combler l'insuffisance d'actif à hauteur de la somme de 298 215,58 €.
N'ayant pas pu ramener à exécution cette condamnation, Me GUYOT , es qualités de liquidateur judiciaire de la SARL SAECL, a fait assigner par acte d'huissier du 20 janvier 2010 Monsieur Louis DEGACHE aux fins de prononcé d'une mesure de faillite personnelle.
Par jugement du 8 septembre 2010 le tribunal de commerce de Grenoble a déclaré l'action recevable et a prononcé avec exécution provisoire à l'encontre de M. Louis DEGACHE une mesure de faillite personnelle pour une durée de 15 ans.
M. Louis DEGACHE a relevé appel de cette décision selon déclaration reçue le 14 septembre 2010.
Vu les conclusions signifiées et déposées le 26 avril 2011 par M. Louis DEGACHE qui demande à la cour, par voie de réformation du jugement, de déclarer l'action de Me GUYOT, ès qualités, irrecevable et subsidiairement mal fondée et de condamner ce dernier à lui payer une indemnité de procédure de 4000 € aux motifs que contrairement aux dispositions de l'article R. 651-2 du code de commerce dans sa rédaction antérieure au décret du 12 février 2009 il n'a pas été convoqué un mois au moins avant son audition personnelle sans possibilité de représentation en chambre du conseil, que l'omission de cette formalité substantielle constitue une fin de non recevoir, qu'en toute hypothèse il y a lieu de substituer à la faillite personnelle qui a été prononcée une mesure d'interdiction de gérer.
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Vu les conclusions signifiées et déposées le 29 juin 2011 par Me GUYOT , ès qualités de liquidateur judiciaire de la SARL SAECL, qui sollicite la confirmation du jugement en toutes ses dispositions et ta condamnation de l'appelant à lui payer une nouvelle indemnité de procédure de 3000 € aux motifs que ta procédure est régulière alors que conformément aux dispositions de l'article R. 652 -2 du code de commerce dans sa rédaction applicable en ta cause du décret du 23 décembre 2006 le dirigeant a été invité à comparaître personnellement par l'assignation délivrée plus d'un mois avant l'audience, que sur le fond la confirmation de la décision s'impose alors que Monsieur DEGACHE , qui est propriétaire de biens immobiliers, s'est soustrait de mauvaise foi à ta condamnation.
Vu les conclusions de confirmation déposées te 25 octobre 2011 par Madame la PROCUREURE GENERALE.
MOTIFS DE L'ARRET
Sur la recevabilité de l'action
Il résulte des articles 190 et 191 de la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises que le chapitre III du titre V du livre VI du code de commerce dans sa nouvelle rédaction, relatif à la faillite personnelle et aux autres mesures d'interdiction, à l'exception de ses articles L. 653-7 et L. 653-11, n'est pas applicable aux procédures collectives en cours au 1er janvier 2006.
Conformément à ces dispositions transitoires les nouvelles modalités de saisine du tribunal en matière de sanctions personnelles introduites par la loi susvisée du 26 juillet 2005 et codifiées à l'article L. 653-7 du code de commerce sont donc applicables aux procédures collectives ouvertes, comme en l'espèce, avant le.1er janvier 2006, même si dans ce cas l'action demeure régie au fond par les dispositions des articles L. 625 -1 et suivants anciens du code de commerce dans leur rédaction de la loi du 25 janvier 1985.
L'article R. 653 -2 du code de commerce, dans sa rédaction du décret du 28 décembre 2005 applicable en la cause (selon l'article 155 du décret du 12 février 2009 pris pour l'application de l'ordonnance du 18 décembre 2008 les nouvelles dispositions de l'article R. 653 -2 ne sont pas applicables aux procédures collectives ouvertes avant le 15 février 2009), prévoit que pour l'application de l'article L. 653-7 te ou les dirigeants mis en cause sont convoqués dans les formes prévues à l'article R. 651 -2.
Les dispositions de l'article 318 alinéa 2 du décret du 28 décembre 2005, devenu R. 651 - 2 du code de commerce, ont été déclarées applicables aux procédures en cours par l'article 361 du décret susvisé.
Ces dispositions prévoient la convocation du dirigeant, par acte d'huissier de justice, un mois avant son audition en chambre du conseil.
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Elles ont été modifiées par l'article 68 du décret du 23 décembre 2006, qui a crée un article 317 - 1 qui se substitue sur la question de la convocation à l'article 318 précité et qui prévoit la convocation du dirigeant un mois avant son audition, toujours par acte d'huissier de justice à ta diligence du greffier, mais sans mention de la chambre du conseil pour tenir compte des dispositions de l'article L. 662 - 3 alinéa 2 du code de commerce selon lesquelles les débats en matière de sanctions ont lieu en audience publique.
S'agissant d'un texte de procédure ces nouvelles modalités sont d'application immédiate.
Il s'en déduit qu'en vertu des dispositions de l'article R. 651- 2 du code de commerce applicables à la date de convocation de M. Louis DEGACHE , ce dernier devait être convoqué un mois au moins avant son audition personnelle par acte d'huissier de justice.
L'action en prononcé d'une mesure de faillite personnelle a été introduite en l'espèce par assignation du 20 janvier 2010 délivrée pour l'audience du tribunal de commerce de Grenoble du vendredi 2 avril 2010 à la requête du liquidateur judiciaire de la société SAECL.
Aux termes de cet acte le dirigeant a été informé d'une part de ce qu'il devait se présenter en personne à l'audience afin d'être entendu sur la demande présentée par Me GUYOT ès qualités et qu'il pouvait alors se faire assister d'un avocat, et d'autre part que pour la suite de la procédure il avait la possibilité de se faire assister ou représenter par toute personne de son choix, le représentant s'il n'est avocat devant justifier d'un pouvoir écrit spécial.
Ensuite de cette assignation l'affaire a été renvoyée à deux reprises et Monsieur Louis DEGACHE a été convoqué par lettres du greffe du tribunat de commerce des 6 et 20 avril 2010 lui rappelant qu'il devait se présenter en personne.
S'il est certain qu'il n'a pas été complètement satisfait aux prescriptions de l'article R. 651 - 2 du code de commerce dans sa rédaction du 23 décembre 2006 applicable en la cause, dès lors que le dirigeant n'a pas été convoqué par acte d'huissier à la diligence du greffier en vue de sa comparution personnelle, cette irrégularité ne constitue qu'un vice de forme, puisque la formalité n'a pas été omise.
Or, ayant disposé de plus de quatre mois pour préparer sa défense au fond, M. Louis DEGACHE n'offre pas d'établir que cette irrégularité lui a causé un grief.
C'est par conséquent à tort qu'il soutient qu'il aurait été irrégulièrement convoqué, alors que conformément aux dispositions applicables de l'article R. 651 - 2 du code de commerce il a été solennellement informé à deux reprises de la nécessité de se présenter personnellement à l'audience ; étant observé que le délai de comparution d'un mois a été respecté
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entre la date de l'assignation et la date du premier appel de l'affaire (2 avril 2010), mais également entre la seconde convocation du greffe par lettre du 20 avril 2010 et l'audience des plaidoiries du 5 juillet 2010.
La fin de non-recevoir soulevée par le dirigeant sera par conséquent rejetée.
Sur le bien-fondé de l'action
Selon l'article L. 625 -6 ancien du code de commerce le tribunal peut prononcer la faillite personnelle du dirigeant de la personne morale qui n'a pas acquitté les dettes de celle-ci mises à sa charge.
Tel est bien le cas en l'espèce alors que la condamnation en comblement de l'insuffisance d'actif de la société SAECL à hauteur de la somme de 298 215,58 €, aujourd'hui irrévocable après rejet du pourvoi en cassation formé à l'encontre de l'arrêt confirmatif de cette cour du 26 juin 2008, n'a été suivie d'aucun paiement malgré les tentatives d'exécution effectuées à la diligence du liquidateur judiciaire.
Le dirigeant ne conteste pas d'ailleurs cette inexécution, puisqu'il se borne sur le fond à demander qu'une simple mesure d'interdiction de gérer soit substituée à la faillite personnelle qui a été prononcée.
Il n'est pas démontré que bien que disposant d'un patrimoine de nature à répondre de la condamnation M . Louis DEGACHE s'est délibérément soustrait à l'exécution de la décision.
Il résulte en effet des pièces du dossier d'une part qu'il serait aujourd'hui salarié, sans toutefois que le montant de sa rémunération ne soit connu, et d'autre part qu'il est propriétaire indivis à concurrence d'un tiers seulement d'une parcelle de terrain d'une contenance de 20 ares et 74 ca située sur la commune de Monestier de Clermont (Isère) , dont la valeur n'est pas précisée.
Dès lors, en l'absence d'éléments suffisants permettant d'affirmer que Monsieur Louis DEGACHE , bien que disposant des ressources nécessaires, fait délibérément obstacle de mauvaise foi à l'exécution de la condamnation, la cour estime devoir prononcer à la place de la faillite personnelle l'interdiction de diriger prévue à l'article L. 625 -8 ancien du code de commerce pendant la durée non contestée de 15 années qui a été retenue par le tribunal .
L'équité ne commande pas enfin de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de Me GUYOT , ès qualités.
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PAR CES MOTIFS LA COUR
Statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et après en avoir délibéré conformément à la loi,
Déclare Me GUYOT, ès qualités de liquidateur judiciaire de la SARL SAECL, recevable en son action,
Confirme le jugement déféré en ce qu'il a retenu la faute du dirigeant pour n'avoir pas acquitté tes dettes de la personne morale mises à sa charge,
Réforme le jugement déféré sur la sanction et statuant à nouveau :
Prononce à l'encontre de M. Louis DEGACHE une mesure d'interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler toute entreprise commerciale, artisanale ou agricole et toute personne morale pendant une durée de 15 années,
Dit n'y avoir lieu en cause d'appel à application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de Me GUYOT , ès qualités, la condamnation prononcée de ce chef en première instance étant toutefois confirmée,
Condamne M. Louis DEGACHE aux entiers dépens de première instance et d'appel.
SIGNE par Monsieur BERNAUD, Conseiller, faisant fonction de Président et par Madame LEICKNER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par te magistrat signataire.
Le Greffier Le Président
POUR EXPÉDITION CONFORME POUR LE GREFFER EN CHEF |